CERN Accelerating science

This website is no longer maintained. Its content may be obsolete. Please visit http://home.cern for current CERN information.

Accueil | Plan du site | Nous contacter
 
dans ce site CERN
L'injecteur de CESAR, un générateur Van de Graaff dont l'enceinte est retirée

En piste avec CESAR

En 1962, Heribert Koziol prit congé de l’Université de Graz, en Autriche, pour venir travailler durant une année au CERN sur l’ultravide. Ses travaux sur CESAR le conduisirent à occuper un poste permanent au CERN, comme physicien des accélérateurs. Il a depuis participé à de nombreux projets d’accélérateurs.

Heribert Koziol« Pour un post-doctorant de 26 ans, venant d’un petit institut de physique, l’arrivée au CERN représentait un changement radical. Même si j’étais habitué à avoir des contacts internationaux, travailler au sein d’une équipe multinationale se révéla une expérience nouvelle et fort agréable. A mon arrivée, en 1962, la division de Recherche sur les accélérateurs avait deux ans ; elle était dirigée par d’éminents physiciens des accélérateurs et était engagée dans un programme passionnant tourné vers l’avenir. Le chef du groupe CESAR, Mike Pentz, était un personnage dynamique et haut en couleur, qui faisait régner dans le groupe une atmosphère d’ouverture, de détente et néanmoins de travail acharné.

A l’époque, il y avait beaucoup de personnages de ce genre au CERN. Je me souviens de colloques dans l’amphithéâtre où fusaient des interjections animées et où l’on assistait à des discussions explosives. Dans le travail également, il fallait composer avec des personnages extrêmement originaux, voire excentriques. L’un des lieux les plus animés de la division était la cafétéria, avec son tableau noir d’une importance capitale. Tout le monde s’y retrouvait, tous les échelons de la hiérarchie. Des discussions y naissaient, on remplissait le tableau noir, on l’effaçait, puis on le remplissait à nouveau. Bien souvent, la discussion ne s’achevait que parce que nous devions rentrer chez nous ! Nous apprîmes beaucoup sur ce tableau noir et c’est également là que je passai mon examen de sélection pour devenir membre du personnel, sans même m’en apercevoir.

D’éminents physiciens des accélérateurs venaient des Etats-Unis et d’Union soviétique. Leurs visites donnaient lieu à des séminaires et des discussions sur des idées folles concernant les nouvelles méthodes d’accélération, et nous donnaient l’occasion de nouer des contacts durables à travers les continents.

CESAR était difficile à manipuler, essentiellement à cause de ses faibles champs magnétiques. L’un de ses composants extrêmement capricieux était le générateur Van de Graaff. Il nécessitait une préparation minutieuse et, après avoir fermé l’enceinte pressurisée, il fallait l’amener graduellement à sa tension nominale. À chaque claquage des 2 millions de volts du Van de Graaff, de fortes détonations se faisaient entendre et il fallait rapidement baisser la tension du générateur pour éviter de nouvelles étincelles.

Cela fut à l’origine d’un événement mémorable. En décembre 1963, nous célébrâmes la circulation du premier faisceau en buvant quelques bulles. J’avais raccordé mon tourne-disque au système d’annonce publique pour faire entendre une musique enlevée. J’avais choisi « A la chasse », une polka de Johann Strauss qui débute par deux coups de pistolet. Lorsque deux détonations de 1 000 watts retentirent par les haut-parleurs dans le hall de CESAR, les verres de champagne valsèrent et le technicien responsable du générateur Van de Graaff se rua sur les commandes pour couper la puissance !

CESAR était une petite machine, facile à adapter à de nouvelles expériences. Un vendredi, nous décidâmes d’ajouter deux aimants sextupolaires pour exciter une résonance du troisième ordre. L’un d’entre nous s’occupa des culasses, l’autre des spires des bobines, un troisième de l’alimentation en énergie et le chef du groupe posa les câbles. Le lundi, nous pûmes étudier les résonances du troisième ordre.

Au-delà du travail scientifique et technique, les membres du groupe CESAR passaient beaucoup de leur temps de loisirs ensemble et lorsque CESAR fut démantelé en 1967, de solides amitiés persistèrent.

Enfin, et ce n’est pas là le moins important, CESAR fut une excellente école pratique sur les accélérateurs, une pépinière d’où sortirent des physiciens des accélérateurs très bien formés et très motivés, qui laissèrent leur empreinte sur les machines ultérieures du CERN. »