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Un technicien travaille sur l'anneau du décélérateur d'antiprotons

Anges et démons

Consultez le nouveau site web sur la science et la fiction dans Anges et Démons: angelsanddemons.cern.ch

Le roman policier de Dan Brown Anges et démons (Angels and Demons) raconte l'histoire d'une société secrète qui veut détruire le Vatican en utilisant une bombe d'antimatière... volée au CERN.

L'ambigramme « Angels and Demons »

ambigramme reproduit avec l'aimable autorisation de John Langdon)

Des lecteurs nous ont posé des questions sur les technologies mentionnées dans le livre. Voici nos réponses.

Le CERN existe-t-il ?

Eh bien oui, il existe ! Vous pouvez nous voir près de la ville de Meyrin.

Est-il situé en Suisse ?

Il est situé en partie en Suisse, en partie en France, à cheval sur la frontière. Le CERN n'est pas un établissement suisse, mais une organisation internationale. Nous sommes très près de l'aéroport international de Genève.

Que signifient les initiales CERN ?

C'est une longue histoire, mais les initiales proviennent du nom « Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire ».

Est-ce un ensemble de bâtiments en briques rouges, où l'on croise des savants revêtus de blouses blanches, chargés de dossiers ?

Non, cette image est très éloignée de la réalité. La plupart de nos bâtiments sont blancs et construits en béton. Nos chercheurs sont habillés comme tout le monde et en général ils n'ont pas de dossier sous le bras.

Le Web a-t-il réellement été inventé au CERN comme le livre l'affirme ?

Oui, incontestablement, le Web a été inventé au CERN par Tim Berners-Lee en 1989.

L'antimatière existe-t-elle ?

Oui, elle existe et nous en produisons régulièrement au CERN. L'antimatière a été prédite en 1928 par Paul Dirac, et les premières antiparticules ont été détectées peu après par Carl Anderson. Le CERN n'est pas le seul centre de recherche à produire de l'antimatière et à l'étudier.

Comment contenir l'antimatière ?

C'est extrêmement difficile, car elle s'annihile complètement au contact de la matière normale.

Nous savons comment contenir des particules d'antimatière porteuses d'une charge électrique dans des « pièges électromagnétiques ». Ces pièges permettent de contenir jusqu'à environ 10 millions de millions – ou 1012 – (anti)particules ayant la même charge. Mais les charges de même signe se repoussent ! Il n'est donc pas possible de mettre ensemble une grande quantité d'antiprotons, car la force répulsive qui s'exerce entre eux devient rapidement trop forte pour que le champ puisse les maintenir à distance des parois.

Le cas des antiparticules et antiatomes électriquement neutres est encore plus compliqué.Il est impossible d’utiliser des champs électriques ou magnétiques pour contenir l’antimatière neutre car ces champs n'ont aucune prise sur eux. Les physiciens réfléchissent à l'utilisation de « bouteilles électromagnétiques » (avec des champs magnétiques non homogènes agissant sur le moment magnétique) ou de « pièges optiques » (exploitant des lasers), mais tout ceci est encore en développement.

Quelles seront les utilisations futures de l'antimatière ?

Les antiélectrons, ou positons, sont déjà utilisés en médecine, dans les scanners TEP (tomographie par émission de positons). À l'avenir, il pourrait même être possible d'utiliser des antiprotons pour irradier des cellules cancéreuses.

Cependant, au CERN, l'antimatière est principalement utilisée pour l'étude des lois de la nature. Nous nous concentrons sur la question de la symétrie entre matière et antimatière. L'expérience LHCb comparera avec précision la désintégration de quarks b et d'antiquarks b. Par la suite, nous espérons être en mesure de faire d'atomes d'antihydrogène des outils de haute précision.

Les atomes d'antimatière existent-ils?

L'équipe de l'expérience PS210 à l'Anneau d'antiprotons de basse énergie (LEAR) du CERN a produit les premiers atomes d'antihydrogène en 1995. Puis, en 2002, deux expériences (ATHENA et ATRAP) sont parvenues à produire des dizaines de milliers d'atomes d'antihydrogène et, par la suite, des millions. Mais, bien que « des dizaines de milliers » puisse sembler beaucoup, c'est en réalité une très petite quantité. Il en faudrait 10 000 000 000 000 000 000 de fois plus pour remplir un ballon d'enfant ! Si nous avions un moyen de stocker notre production journalière, il nous faudrait plusieurs milliards d'années pour le gonfler. Or, l'Univers n'existe que depuis environ 13,7 milliards d'années... Le scénario du roman Anges et Démons relève donc de la pure fiction.

Pouvons-nous espérer utiliser cette antimatière comme source d'énergie ? Pensez-vous que l'antimatière pourra alimenter des véhicules, à l'avenir, ou pourra-t-elle seulement être utilisée dans des sources d'énergie d'envergure ?

Il n'y a aucune possibilité d'utiliser l'antimatière comme « source » d'énergie. À la différence de l'énergie solaire, du charbon ou du pétrole, l'antimatière n'existe pas dans la nature : nous devons produire chaque antiparticule en dépensant beaucoup plus d'énergie qu'elle n'en restitue lors de son annihilation.

Vous pouvez imaginer l'antimatière comme un milieu de stockage temporaire d'énergie, sur le même principe que l'accumulation d'électricité dans une batterie rechargeable. Le processus de charge d'une batterie est réversible, avec des pertes relativement faibles. Néanmoins, l'énergie dépensée lors la charge est plus importante que celle qu'on peut en tirer ensuite.

La production d'antimatière présente un rendement très faible : l'énergie disponible ne représente qu'un dixième de millionième (10-10) de l'énergie dépensée. Si nous pouvions rassembler toute l'antimatière que nous avons produite au CERN et l'annihiler avec de la matière, nous obtiendrions juste assez d'énergie pour allumer une ampoule électrique pendant quelques minutes.

J'espérais que l'antimatière pourrait être la réponse de l'avenir à nos besoins d'énergie. Il semble qu'il faudra encore de longues recherches pour y parvenir.

Non, même avec plus de recherche, la situation ne changera pas ; l'antimatière n'est vraisemblablement pas la réponse à nos problèmes d'énergie. D'abord, parce qu'il faut de l'énergie pour produire de l'antimatière (E=mc2) et, malheureusement, la quantité d'énergie ainsi obtenue n'est pas la même (les facteurs de perte sont énormes, voir ci-dessus).

De plus, la conversion d'énergie en particules de matière et d'antimatière suit certaines lois de la nature. Pendant ce processus, de nombreuses autres particules et antiparticules à très courte durée de vie (p. ex.: les muons, les pions et les neutrinos) sont également produites. Celles-ci se désintègrent rapidement et leur énergie est perdue.

L'antimatière ne pourrait devenir une source d'énergie que si l’on trouvait un grand gisement quelque part (par exemple dans une galaxie lointaine), de même que nous pouvons trouver du pétrole ou de l'oxygène sur notre planète. Mais aussi loin que nous puissions observer notre Univers (à des milliards d'années-lumière), il est entièrement constitué de matière normale et l'antimatière doit être créée avec peine.

Ceci montre en passant que la symétrie entre la matière et l'antimatière mentionnée plus haut n'est pas vérifiée aux très hautes énergies — par exemple aux premiers instants après le big-bang — puisque autrement il devrait exister autant de matière que d'antimatière dans l'Univers. Les recherches futures devraient pouvoir nous dire comment cette asymétrie s'est produite.

Pouvons-nous fabriquer des bombes d'antimatière ?

Non. Il faudrait des milliards d'années pour fabriquer une bombe à antimatière ayant la même capacité destructrice qu'une bombe à hydrogène « classique », comme il en existe déjà plus de dix mille.

Remarque sociologique : les chercheurs scientifiques avaient réalisé que la bombe atomique était une possibilité réelle, des années avant qu'on ne la construisit effectivement et qu'on ne la fit exploser — à la surprise totale et à la stupéfaction du public. Par contre, c'est ce même public qui a imaginé la bombe d'antimatière et qui veut en savoir plus sur cette arme, alors que nous savons depuis longtemps que c'est une chimère...

Pourquoi les médias ne s'intéressent-ils pas à l'antimatière ?

L'antimatière a beaucoup retenu l'attention des médias, bien qu'il s'agisse généralement de la presse scientifique. Et puis, ce n'est pas une « nouveauté » : nous connaissons et étudions les antiparticules depuis 75 ans. Ce qui est nouveau, c'est la possibilité de produire des atomes d'antihydrogène, mais cela est également une question d'intérêt scientifique.

L'antimatière est-elle vraiment efficace à 100% ?

Cela dépend de ce que vous entendez par efficace. Si vous partez de deux quantités m/2, égales, de matière et d'antimatière, vous obtenez exactement E=mc2 d'énergie. Bien sûr. Elle se convertit à 100%.

Mais il faut prendre le problème autrement : quel effort devez-vous fournir pour produire m/2 grammes d'antimatière? D'accord, théoriquement E=mc2 parce que la moitié de l'énergie deviendra de la matière normale. Ainsi, vous ne gagnez rien. Mais le processus de création d'antimatière est d'une très faible efficacité : quand l'énergie se transforme en matière, beaucoup de particules et d'antiparicules différentes (y compris des particules à très courte durée de vie) sont produites. La plus grande partie de l'énergie est perdue et nombre des particules d'antimatière stables (p. ex.: les posions et les antiprotons) s'échappent avant que vous ne puissiez les capturer. Tout se déroule presque à la vitesse de la lumière et les particules créées fusent dans toutes les directions. Un peu comme lorsque vous cuisinez sur un feu de camp : la plus grande partie de la chaleur est perdue. Au lieu de chauffer le plat que vous voulez faire cuire, elle disparaît sous la forme d'un rayonnement qui se perd dans le ciel nocturne. Très inefficace !

Fabriquez-vous l'antimatière comme c'est décrit dans le livre ?

Non. La production et le stockage d'antimatière au CERN ne s'effectuent pas du tout comme le livre le décrit. Vous ne pouvez pas la voir sortir du Grand collisionneur de hadrons (LHC), notamment parce que cet accélérateur n'est pas encore en service.

Pour faire des antiprotons, nous bombardons un bloc de métal, tel que le cuivre ou le tungstène, avec des protons (et une énergie cinétique d'environ 25 GeV). Il en sort un grand nombre de particules, dont certaines sont des antiprotons. Seuls ces derniers sont utiles, et seulement ceux qui jaillissent dans la bonne direction. C'est ainsi que votre énergie se perd : c'est comme si vous essayiez d'arroser un pot de fleur avec un système aspergeant tout le jardin. Bien sûr, nous trouvons en permanence de nouvelles astuces pour augmenter l'efficacité de collecte des antiparticules, mais au niveau des particules élémentaires, c'est extrêmement difficile.

Alors, pourquoi construisez-vous le LHC ?

Nous ne construisons pas l'accélérateur LHC pour fabriquer de l'antimatière. Le LHC doit produire des concentrations d'énergies suffisamment élevées pour étudier des effets qui nous aideront à répondre à certaines des questions laissées en suspens par la physique. Nous disons bien concentrations, parce qu'il ne s'agit pas de grandes quantités d'énergie, mais de concentrations énormes. L'énergie de chacune des particules que nous accélérerons dans le LHC est équivalente à celle d'un moustique en vol. Ce n'est vraiment pas beaucoup en valeur absolue, mais elle sera concentrée dans un espace extrêmement petit, à l'intérieur duquel la matière ressemblera, très brièvement (environ un millionième de millionième  de seconde), à l'état de l'Univers peu après le big-bang. Vous pouvez comparer l'effet de la concentration à deux personnes marchant sur un tapis. Si un homme corpulent portant des chaussures plates et une femme menue chaussée de souliers à talons aiguilles marchent sur le même tapis, le premier ne laisse pas de traces, alors que la seconde, bien que plus légère, peut laisser des marques. La pression des talons aiguilles est beaucoup plus forte que celle des chaussures plates. C'est ce que fera le LHC : concentrer un peu d'énergie dans un espace minuscule pour produire l'effet d'une concentration énorme et apprendre quelque chose sur le big-bang.

Le CERN a-t-il un accélérateur de particules d'une longueur de 27 kilomètres ?

L'accélérateur LHC est un anneau de 27 kilomètres de circonférence enfoui dans un tunnel à environ 100 mètres sous terre. Vous pouvez voir le tracé de son anneau sur une carte de la zone.

En fait, pourquoi faites-vous de l'antimatière au CERN ?

Principalement pour étudier les lois de la nature. Les théories actuelles de la physique prévoient un certain nombre d'effets, dont beaucoup concernent l'antimatière. Si les expériences ne permettent pas d'observer les effets prévus, la théorie n'est pas juste. Elle doit alors être modifiée ou reprise. C'est ainsi que la science progresse.

Une autre raison est que l'on cherche à obtenir, lors de collisions de particules de matière et d'antimatière, des densités d'énergie extrêmement élevées, résultant de l'annihilation de ces particules lorsqu'elles se rencontrent. Cette énergie d'annihilation peut permettre la création d'autres particules intéressantes. C'était le principe de base du Grand collisionneur électron-positon, ou LEP, qui a fonctionné au CERN jusqu'en 2000. C'est également ainsi que fonctionne le Tevatron au Fermilab, près de Chicago.

Comment l'énergie est-elle extraite de l'antimatière ?

Quand une particule de matière normale heurte une particule d'antimatière, ces deux particules s'annihilent réciproquement en produisant un jaillissement très concentré d'énergie pure, à partir de laquelle des particules sont alors créées. Le nombre et la masse des produits d'annihilation dépend de l'énergie disponible.

L'annihilation d'électrons et de positons à de basses énergies ne produit que deux (ou trois) photons énergétiques. Mais l'annihilation à de très hautes énergies permet la création de centaines de nouvelles paires particule-antiparticule. La désintégration de ces particules produit, entre autres, beaucoup de neutrinos, qui n'interagissent pas du tout avec leur environnement. Cela n'est pas très utile lorsqu'on veut en extraire de l'énergie.

Dans quelle mesure l'antimatière est-elle inoffensive ?

Totalement inoffensive, étant donné les quantités infimes que nous produisons. L'antimatière pourrait être très dangereuse si nous pouvions en produire quelques grammes, mais cela prendrait des milliards d'années.

Mais, dans ce cas, le CERN a-t-il prévu des protocoles pour préserver la sécurité publique ?

L'antimatière ne présente aucun danger. Bien sûr, d'autres dangers existent dans l'enceinte du CERN, comme dans tout laboratoire : haute tension dans certaines zones, fosses profondes, etc. Mais, pour ces dangers, les mesures habituelles de sécurité industrielles ont été prises. Il n'y a aucune risque de fuite radioactive dangereuse pour le public, comme ce pourrait être le cas au voisinage de centrales nucléaires.

Un gramme d'antimatière contient-il l'énergie d'une bombe nucléaire de vingt kilotonnes ?

Vingt kilotonnes d'explosif TNT ont une énergie équivalente à celle de la bombe atomique qui a détruit Hiroshima. L'explosion d'une kilotonne (1000 tonnes) de TNT correspond à un dégagement d'énergie de 4,2x1012 joules (la notation 1012 signifie 1 suivi de 12 zéros, c'est-à-dire un million de millions). À titre de comparaison, une ampoule électrique de 60 watts consomme 60 joules par seconde.
La question peut prêter quelque peu à confusion : vous voulez probablement parler de la libération d'énergie explosive résultant de l'annihilation soudaine d'un gramme d'antimatière. Calculons donc cette énergie.
Pour calculer l'énergie dégagée lors de l'annihilation d'un gramme d'antimatière avec un gramme de matière (ce qui fait 2 g ou 0,002 kg), il faut utiliser la formule E=mc2, où c est la vitesse de la lumière (300 000 000 m/s) :
E= 0,002 x (300,000,000)2 kg m2/s2 = 1,8 x 1014 J = 180 x 1012 J. Etant donné que 4,2x1012 J correspondent à une kilotonne de TNT, l'annihilation de 2 g de matière-antimatière correspond à 180/4,2 = 42,8 kilotonnes, environ deux fois plus que 20 kilotonnes de TNT.
Il « suffit » donc d'un demi-gramme d'antimatière pour avoir un effet aussi destructif que la bombe d'Hiroshima, le demi-gramme de matière normale étant assez facile à trouver.

Au CERN nous produisons des quantités de l'ordre de 107 antiprotons par seconde et un gramme d'antihydrogène en contient 6x1023. Il vous est facile de calculer le temps qu'il nous faudrait pour fabriquer ce gramme : il nous faudrait 6x1023/107= 6x1016 secondes. Comme une année ne contient que 365 (jours) x 24 (heures) x 60 (minutes) x 60 (secondes) = 3x107 secondes, cela prendrait en gros 6x1016/3x107 = 2x109 ou environ deux milliards d'années ! Il est très peu probable que quelqu'un ait envie d'attendre aussi longtemps...

Les chercheurs du CERN ont-ils vraiment inventé l'internet ?

Non. L'internet initial était fondé sur les travaux conduits par Louis Pouzin en France, repris par Vint Cerf et Bob Kahn aux Etats-Unis, dans les années 1970. Mais le Web a été inventé et entièrement mis au point par Tim Berners-Lee et une petite équipe du CERN, entre 1989 et 1994. L'histoire de l'internet et du web est racontée dans « La naissance du Web », un livre en anglais (« How the Web was born »), peut-être moins accrocheur qu'Anges et démons, mais ne présentant que des témoignages et des résultats de recherche réels.

Est-ce que le CERN possède un avion spatial X-33 ?

Malheureusement pas.

octobre 2004
Dernière mise à jour : janvier 2008

Liens

  • Entretien avec Rolf Landua, un physicien du CERN qui aurait pu inspirer le personnage de Leonardo Vetra créé par Dan Brown
  • Expériences sur l'antimatière au CERN: ALPHA, ATRAP, ASACUSA
    La contribution du LHC: l'expérience LHCb
  • Expériences l'antimatière dans le monde: BaBar, Belle
  • Antimatière dans l'espace: AMS