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C'est dans les bureaux de ce couloir du CERN que les technologies de base du World Wide Web furent développées

Un terrain propice

Robert Cailliau fut le premier collaborateur de Tim Berners-Lee sur le projet du World Wide Web. Avocat infatigable du Web, il mit en place les conférences sur le World Wide Web et resta membre du comité d’organisation de 1994 à 2004.

Robert Cailliau« Les trente années que j’ai passées au CERN ont été assez incroyables. Jeune ingénieur, je travaillais à améliorer l’interface avec les systèmes techniques complexes et j’avais entendu parler du CERN. Mais c’est seulement à mon arrivée ici, en 1974, que j’ai pris pleinement conscience de la portée et de l’échelle de l’entreprise menée. Mon université s’était engagée dans un projet du CERN, à la suite duquel j’ai intégré une équipe qui allait développer l’un des systèmes assistés par ordinateur les plus intéressants qu’il m’ait été donné de voir. C’était dans les années 1970. Pourtant, pour décrire ce que nous avons construit alors, je dois utiliser des termes actuels. Nous avions des écrans tactiles, des interfaces graphiques, des applets (ou mini-applications) qui se propageaient dans le réseau, une messagerie instantanée. Rien d’étonnant donc à ce que le CERN se soit révélé un terrain propice à l’invention du Web, à la fin des années 1980.

Je suis sorti de ce premier projet avec une vision en tête : si l’on pouvait doter tout le monde d’un clavier et d’un écran et les relier par le biais du réseau du CERN, les bénéfices seraient immenses. Bien entendu, je n’étais pas le seul à penser cela, surtout dans un endroit comme le CERN, où nous étions tous très informés de ce qui se passait sur le reste de la planète. Il y a eu de nombreuses tentatives de création d’une bibliothèque électronique facile à utiliser, toutes avec des noms entièrement en majuscules, tels que CERNDOC, NOTIS et autres.

Si avoir une idée est une chose, la mettre en pratique en est une autre. Et c’est là que Tim Berners-Lee est entré en scène. Tim avait une idée et les moyens de la transformer en réalité. Lorsque j’ai commencé à travailler avec lui, son projet ne portait pas de nom. En mai 1990, nous avons décidé de le baptiser. J’avais des idées très arrêtées sur ce que le nom ne devait pas être. Je ne voulais ni dieux grecs, ni pharaons égyptiens, très en vogue dans la communauté des physiciens. Je refusais aussi les noms entièrement en majuscules. Je voulais une appellation concise. Mais j’aurais mieux fait d’épargner ma salive, car Tim avait déjà décidé d’appeler son invention le World Wide Web (Toile d’araignée mondiale). Avant même que le projet n’ait relié quelques laboratoires de physique entre eux, Tim savait ce qu’il allait devenir.

Le Web a envahi ma vie au cours des dix années suivantes, mais je n’avais pas vraiment l’impression d’être au « boulot ». À présent je ne travaille plus sur ce sujet, contrairement à Tim. Je sais que sa vision dépasse largement le « read-only » Web actuel. J’espère que nous pourrons tous voir un jour ce qu’il avait déjà à l’esprit en mai 1990.

Rétrospectivement, je me rends compte que le CERN était le lieu idéal, peut- être même le seul susceptible de permettre au Web de prendre son envol. Il concilie la liberté académique, l’esprit d’entreprendre et le pragmatisme qui, bien équilibrés, constituent le terreau du succès. »